mardi 31 décembre 2013

La guerre de René Tardi

 
© Casterman 2012 - Tardi
Il est des choses qui ne peuvent se deviner, la raison de la colère d’un père est l’une d’elles. Sur trois cahiers, René Tardi a révélé sa drôle de guerre et sa captivité. Ce qu’il n’avait jamais dit, il l’a finalement écrit. Un travail de mémoire qui n’éteint pas les rancœurs et n’efface pas des années d’incompréhension mais permet, même tardivement, de se comprendre enfin ! 

Un pays se souvient plus facilement de ses victoires que de ses défaites et c’est certainement pour cette raison que notre Histoire retient la France qui a résisté et beaucoup moins de celle qui s’est battue en mai 1940. Ainsi, le courage de ces soldats submergés par un raz de marée vert-de-gris n’a pu effacer la suffisance de l’état-major français de l’époque. 

À travers le graphisme de son fils, René Tardi lui raconte le pourquoi de son engagement et l’origine de sa haine. Il décrit enfin sa détention en Poméranie et ses jours de combat à surmonter la faim qui torture le ventre jusqu’à l’obsession et le fatalisme qui pousse à supporter l’insupportable. Dans une mise en abyme faisant abstraction du temps passé, le créateur d’Adèle Blanc-Sec se transpose - gamin - dans le récit de son paternel et établit un dialogue transgénérationnel surréaliste. Pas de grandiloquence, juste un enfant devenu adulte qui apprend à connaître son père par le biais de planches structurées en panoramique dont la linéarité comme la mise en couleur (de Rachel Tardi) rendent compte avec une justesse rare de désillusions qui marqueront irrémédiablement. 

Stalag II B est une autre vision de la Deuxième Guerre mondiale, celle de ces hommes qui résistèrent à leur manière en luttant contre le froid, le dénuement, les privations et la mort. Pas de faits guerriers glorieux pour marquer la Nation seulement, l’abnégation à vouloir revenir embrasser les siens. Un album d’une poignante et grande simplicité.

dimanche 29 décembre 2013

Effectivement, il y en a pour tous les goûts...

Tony Chu : 7. Dégoûts et des douleurs

© Delcourt 2013 : Layman & Guillory
Toni est morte, et ça, son flic de frère ne le digère pas ! 

Dégoûts et des douleurs permet de révéler un Tony Chu qui prend de l’épaisseur. Il est des épreuves qui vous murissent un homme, même s’il est élevé au jus de betteraves. Entre Le Vampire qui veut le recruter, l’Église de la divinité de l’œuf immaculé qui cherche à le convertir, Savoy qui tente de le manipuler via Olive ou la bande de dégénérés qu'il côtoie quotidiennement, l’agent cibopathe est à deux doigts de voler dans les plumes de celui qui osera se prendre de bec avec lui. 

Un petit changement s’opère donc subtilement avec ce titre. Si l’humour loufoque, voire potache, est toujours présent – à ce titre, la Navy en récolte pour son grade - John Layman donne à son héros une détermination qui ne lui est pas coutumière. Cependant, il serait dommage que cette opiniâtreté devienne mécanique et récurrente, car la dimension humoristique en souffrirait. Album de transition, Dégoûts et des douleurs reste un grand moment graphique et le style de Rob Guillory est inlassablement et génialisimement délirant, allant - pour un comics US - jusqu’à réaliser certains de ses gags dans la langue de Molière !

Les inconditionnels trouveront peut-être cet opus moins iconoclaste qu’à l’ordinaire… mais il semblerait que Tony en ait marre de déguster !

Escapade tourangelle

Les innocents coupables : 3. La liberté

© Bamboo 2013 - Galando & Bizot
Jean, Miguel, Adrien et Honoré préparent une nouvelle évasion et, cette fois, pas question d’échouer à nouveau en quartier disciplinaire. Il ne s’agira pas de fuir droit devant, mais de bien préparer son coup pour que cette dernière tentative… soit la bonne. 

Dernier volet de la trilogie des Innocents coupables pour Laurent Galandon et Anlor. Sur une base préparée depuis deux albums, les auteurs relatent la patiente mise en œuvre d’une escapade spectaculaire et orchestrée de première. Un dénouement qui permettra aux héros de sortir de leur condition de forçat pour enfin vivre normalement, du moins comme avant ! 

Cette série confirme le talent de scénariste de Laurent Galandon qui sait, sur des sujets telle la colonie pénitentiaire de Mettray ou le retour au pays d’un combattant de 14-18 (Pour un peu de bonheur), porter des scénarios qui ouvrent sur des récits complexes et parfaitement structurés qui savent finalement résister à la facilité du happy-end. Parallèlement, afin d’accompagner ce récit, le dessin d’Anlor a su évoluer, délaissant les rondeurs au profit des angles, mieux à même de rendre compte des privations et de la dureté des conditions de vie de cette maison de redressement. 

Ainsi, ce referme une histoire plaisamment racontée.

jeudi 26 décembre 2013

Compté 5 fois avant le KO final !

Championzé

© Futuropolis 2010 - Ducoudray & Vaccaro
Amadou M'Barick Fall est né à St Louis, au Sénégal. Arrivé en France dans les jupons d’une actrice néerlandaise, il découvrira la pratique du noble art. À la force de ses poings, dans un style plus que personnel, il deviendra le premier champion du monde africain, raflant le titre à un certain Carpentier. Cependant, sa gloire sera éphémère. 

Décrivant le combat quotidien d’un homme qui n’avait que ses gants pour faire face au racisme ordinaire d’une bonne société certaine de sa supériorité, Championzé retrace le destin hors norme de Battling Siki. 

Côté scénario, Aurélien Ducoudray prend un parti très linéaire, dont il rompt cependant la monotonie en faisant intervenir quelques témoins pour évoquer – au passé - le boxeur, sans pour autant insuffler à l’ensemble un rythme suffisant. Pour sa part, Eddy Vaccaro sert un graphisme aux allures de crayonné qui aurait mérité peut-être d’un peu plus de précision, mais qui, avec sa bichromie et sa pagination traditionnelles, suscite une atmosphère surannée des plus appropriées. 

Après Championzé, Young permet au duo Ducoudray/Vaccaro de s’atteler au deuxième volet de leur trilogie. À noter que simultanément paraissaient dans les bacs des librairies et sur grands écrans, deux versions de la destinée tragique de Victor Younki.

lundi 23 décembre 2013

Voilà ! C'est fini... (air connu)

L'histoire secrète : 32. Apocalypso

Apocalypso ! C’est sur ce titre que s’achève l’odyssée des Archontes. Conçue en 2005 comme un spin-off d’Arcanes et d’Arcane majeur, la série a acquis depuis une dimension qui a fait de l’ombre à ses ainées. De Genèse à ce trente-deuxième album, Dyo, Reka, Aker et Erlin ont ainsi parcouru et tenté de manipuler plus de cinq mille ans d’Humanité. 

© Delcourt 2013 - Pécau & Kordey
Les tenants de la thèse de la conspiration se réjouiront de constater que l’Histoire est bien façonnée par le combat de forces obscures, tandis que ceux qui sont persuadés de l’impossibilité d’infléchir le fil du temps seront confortés dans leur approche. Histoire secrète réussit donc à combler les uns et les autres grâce à l’habileté de Jean-Pierre Pécau. Si ce que d’aucuns considèrent, à tort, comme une "BDnovela" ne modifiait pas fondamentalement le cours des choses tel que nous l’appréhendons, il faut cependant reconnaître que les luttes fratricides des quatre familles savaient remettre quelques faits historiques notoires en mémoire, tout en modifiant singulièrement la manière de les aborder. 

La série avait été pensée pour des parutions rapprochées et plusieurs dessinateurs devaient initialement se relayer pour maintenir une fréquence de sortie soutenue. Si Geto et Goran Sudzuka ne firent qu’un passage éclair sur Le Graal de Montségur, à l’instar de Léo Pilipovic qui n’intervint que sur Les clés de Saint Pierre et 1666, Igor Kordey est celui qui œuvra sur le reste de la saga. Capable de produire au moins deux albums par an - ce qui lui fut souvent reproché -, il a su imprimer un style puissant qui sort du convenu et sait capter l’attention. Ici, l’important est à rechercher dans la tension qui se dégage des planches et non pas dans la précision des vignettes. 

Les généralités étant rappelées, qu’en est-il de cet ultime volet ? 

Il serait dommage de dévoiler prématurément un épilogue tant attendu. Tout juste peut-on évoquer un final au rythme soutenu qui permet de boucler la boucle et aurait certainement mérité, du fait d’un contenu assez dense et d’ellipses conséquentes, quelques pages de plus. Il n’en sera pas dit davantage ! 

Comme toute chose, Histoire secrète connaît finalement... une fin, mais ce n’est un secret pour personne, le trio Pécau/Kordey/O’Grady préside désormais à la destinée des 30 deniers ! Rendez-vous est pris le 5 février 2014.

Pernette et le pot... au feu !

Les chemins de Malefosse : 21. Plaie d'argent 

© Glénat 2013 - Bardet & Goepfert
Il est des chemins qui ne cessent de se croiser. À croire que le destin ne prend de sens que s’il peut les entremêler à loisir. Apparemment, tel est le cas pour Gunther, Pritz, Pernette de Courcelles et le frère Louvel dans Les Chemins de Malefosse

L’avènement des Bourbons au trône de France ne fut pas une partie de plaisir dans un pays en proie à une guerre de religions. La période étant déjà fort confuse, le scénario ne semble devoir rien simplifier. Si son érudition est à saluer, il devient à l’évidence nécessaire de savoir vers quel dénouement il compte mener ; car aujourd’hui, il n’est question que d’une histoire décousue, passant d’un lieu (ou d’une temporalité) à l’autre avec une facilité déconcertante. Reste le dessin de Brice Goepfert dont le réalisme maintient quelque intérêt à la série. 

Une mise en perspective des albums futurs serait la bienvenue, au risque de voir les héros se perdre dans les méandres d’une époque que bien peu maîtrisent.

dimanche 22 décembre 2013

Tous les deux sans personne... (air connu)

Une nuit à Rome : 2. Tome 2

© Bamboo 2013 - Terrasson
Pour vingt-quatre heures à Rome dans les bras de Marie, Raphaël va mettre une partie de sa vie en l’air. Il est des choix qu’il faut assumer et c’est là que cela se complique. 

L’immaturité de quadragénaires adulescents, la nostalgie d’un avenir imaginé autrement, la peur de s’engager durablement, autant de bonnes raisons pour transgresser la routine et retrouver la femme de ses vingt ans. Jim dépeint avec une certaine justesse, et une pointe d’idéalisme, les états d’âmes et les interrogations bien connues de ceux qui ont franchi le cap de la quarantaine. Le tout est qu’il n’est pas toujours donné à chacun de retrouver son amour de jeunesse dans la chambre 118 du Palazzo Medici de la place Navone… Si le graphisme sait rendre des ambiances avec justesse et donne à cette fable urbaine des allures de conte, il convient cependant de regretter finalement une vision par trop idéalisée des rapports amoureux. 

Jolie prestation promise à un bel avenir cinématographique, Une nuit à Rome s'articule autour d'un thème que Jim a décidé d’exploiter jusqu’au bout avec Où sont passés les grands jours.

Veni, vidi et pas vici !

Aigles de Rome (Les) : 4. Livre IV 

© Dargaud 2013 - Marini
Arminius a trahi Rome. Le Castrum Visurgis ignore encore que ses jours sont comptés et désormais, seul Marcus est capable d’arrêter son ancien frère d’armes. Encore faut-il qu’il lui en soit laissé la possibilité ! 

Ce quatrième opus des Aigles de Rome illustre le brio de Enrico Marini dans l’art du combat. Nombre de ses planches exploitent pleinement sa capacité à valoriser – par ses cadrages et son dessin - la force et l’agilité des belligérants. Toutefois, cette approche esthétique ne lui fait pas oublier de travailler un scénario qui sait jouer sur différents registres. Haine, fourberie, traitrise toute la gamme des bassesses humaines semble avoir été utilisée et seule la probité de Marcus émerge du lot. 

Romains et guerriers germains n’étaient pas des enfants de chœur et l'auteur italiano-helvète sait parfaitement le rappeler, tout en donnant à l’ensemble une dimension épique totalement maitrisée.

vendredi 20 décembre 2013

Les champs d'honneur...

La faucheuse des moissons : 1. Les blés coupés
 
© Physalis 2013 - Chabaud & Monier
Ce 11 novembre est l’occasion de décorer l’un des derniers combattants de la Grande Guerre. Alors que l’édile local égraine ses poncifs, Jean Rocaillon se souvient de la boue, de la peur, de la douleur, de ceux fauchés par la mitraille ou asphyxiés par les gaz, de tous ces hommes qui, comme lui, partirent un matin d’août 1914, la fleur au fusil, certains de revenir victorieux pour Noël…

Depuis quelques mois déjà, la guerre 14-18 hante les phylactères et il n’y a qu’a se référer à la thématique sur BDGest pour s’en convaincre. Même s’il tend à s’estomper de l’inconscient collectif, les contemporains du conflit s’éteignant un à un, l’évènement se doit d’être commémoré, ne serait-ce qu’en mémoire de ceux tombés à terre et qu’importe sous quel drapeau. La faucheuse des moissons y concourt à sa manière.

En juin dernier, Frédéric Chabaud et Julien Monier s'attachaient avec Sang noir à l’une des pages méconnues de la Der des Ders : celle de l’engagement des troupes coloniales. Cette fois, il s’agit de suivre un groupe de jeunes gens dans ce qui deviendra la Première Guerre mondiale. Cet opus d’ouverture, la série devant comprendre au moins trois volumes, permet de planter le décor et de présenter les acteurs. Il est ainsi question de Lucien, Jean, Joseph…, de leurs amitiés, de leurs différences et de Charlotte… Structurée en chapitres, Les blés coupés est une chronique sociale de l’ordinaire dévolue au quotidien de ceux qui garniront les premières lignes. Pour accompagner cette histoire, le trait de Lucien Monier, d’une simplicité enfantine dans la première partie, prend ensuite de la maturité sans cependant pouvoir se départir d’un relatif manque de constance. Il bénéficie toutefois d’une mise en couleurs subtilement rehaussée par le papier mat et épais choisi par les éditions Physalis.

Après la nostalgie d’un temps révolu, Les cicatrices de la terre devraient rappeler à tout un chacun la tragique réalité des débuts du XXe siècle.

vendredi 13 décembre 2013

Catalina ! Je suis conquis, j'l'adore...

Conquistador : Tome III
 
© Glénat 2013 - Dufaux & Xavier
En cette fin du mois de mai 1520, Tenochtitlan et ses environs sont l’objet d’une intense agitation. Chacun se prépare à l’assaut ultime, les dernières alliances se font et se défont dans le sang et les larmes. Rêvant de gloire et de richesses, chacun sait que son avenir se jouera dans les semaines qui vont suivre. Mais le destin des hommes leur appartient-il ou est-il l’apanage des dieux qui hantent la canopée ? 

Conquistador est une mécanique parfaitement rodée. Un bel hidalgo sous l’emprise d’une malédiction qui lui échappe, une kyrielle de vrais méchants qui s’égaillent au sein de chaque camp et quelques créatures de rêves aussi désirables que dangereuses. Voilà pour les personnages. Côté décors, une jungle luxuriante et la mégalomanie architecturale de la capitale de Moctezuma permettent à Philippe Xavier de donner forme à l’imagination débridée d’un scénariste qui réinterprète la fin de l’empire aztèque. 

Il faut se rendre à l’évidence, cet album est très bien réalisé et c’est peut-être là que, curieusement, se trouve son principal défaut. Jean Dufaux a beau s’évertuer à inventer des héros torturés et des situations compliquées, l’ensemble demeure trop parfait, trop calibré, pour permettre une réelle empathie avec Catalina Guerero ou Hernando Del Royo. Ce troisième opus se lit comme se regardent ces superproductions où l’héroïne, malgré un séjour prolongé dans les tréfonds d’une geôle putride réapparait au grand jour, plus belle et vénéneuse que jamais. La perfection du dessin de Philippe Xavier, mais aussi une certaine emphase scénaristique y sont certainement pour quelque chose. 

Quoiqu’il en soit Conquistador reste une série à laquelle il est difficile de reprocher l’efficacité de son script ou la maîtrise graphique de ses planches.

Highway to Hell (air connu)

Bouncer : 9. And back

Le Bouncer a évité le pire puisqu’il est toujours en vie. Après quelques difficultés, somme toute compréhensibles en pareil lieu, il s’extrait du guêpier de Deep-End en emportant Pretty John avec lui. Mais le plus dur reste à faire, semer ses poursuivants et arriver vivant à Barro-City ! 

© Glénat 2013 - Jodorowsky & Boucq
Alejandro Jodorowsky n’a pas son égal pour décrire l’enfer dans lequel ses personnages se complaisent sans aucune retenue. Aussi sait-il transformer Deep-End en digne émule de Gomorrhe où, entre deux rapines, la lie du Grand Ouest se donne rendez-vous et s’adonner librement à ses débordements. La perversion est un fond de commerce que l’auteur chilien cultive ici avec talent, ce qui ne lui fait cependant pas oublier qu’il faut savoir aller au-delà pour écrire un bon scénario. 

Si le sexe et la violence règnent en maitres sur le pénitencier et un sur bon tiers de l’album, il est un moment où il est nécessaire de varier les plaisirs et de revenir aux fondamentaux du genre. Une fois la tumultueuse évasion réussie, il s’ensuit une poursuite, à travers la fournaise du désert et le froid mordant du col de l’Aigle, d’une rare efficacité et terriblement humaine dans sa démesure. Et que dire d’un final surprenant qui traduit à lui seul le brio d’un scénariste, certes souvent décrié, mais résolument à part ? 

Un tel script exige un dessin qui puisse exprimer toutes ces passions sans les dénaturer. François Boucq est celui qui en donnant corps à ces pulsions, leur confère toute leur crédibilité. Associé à une maitrise des décors qui entre en résonance avec l’univers tourmenté du réalisateur de La Danza de la Realidad, il imprègne ce diptyque d’une couleur qui en décuple l’intensité dramatique. 

D’une superbe manière, To Hell comme And Back revisitent les canons du western. Que demander de plus ?

lundi 9 décembre 2013

Toute ma vie, j'ai rêvé (air connu)


© Paquet 2013 - Vier
Il est des seconds qui se voudraient les premiers. Richard de Winter appartient à cette catégorie, et il aurait pu inscrire son nom à jamais dans les nuages si, le devançant systématiquement, Gabriel Montaigue n’avait été là ! De déconvenues en désillusions, l’aristocrate n’aura de cesse de supplanter son éternel rival. Qu'importe les moyens employés. 

Fidèles à leur ligne éditoriale, les éditions Paquet entraînent leurs lecteurs vers les firmaments, et cette fois, c’est un jeune autodidacte helvète qui est aux commandes. 

King Richard n’est pas seulement l’histoire de deux pionniers anglais de l’aviation qui se disputent le ciel et, accessoirement, les faveurs de la baronne Elise d'Astarac. Il est, surtout, question de la volonté de réussir malgré les handicaps et des dérives qu’une telle détermination peut causer. Prenant pour cadre, les prémices du XXe siècle et les bouleversements technologiques qui l’accompagnent, Max Vier signe un scénario qui retrace le destin fictif et cruel d’un pilote qui se voulait le meilleur. Le recours à la métaphore aérienne qui permet de tutoyer les cieux, est alors l’occasion de jolies planches. Riche à en devenir confus, le script alterne des séquences narratives avec une voie en off à la première personne, des flashbacks oniriques et de tournoyantes envolées. Toutefois, cette richesse finit par nuire à la lecture et à la compréhension du récit, tout comme la confusion des physionomies masculines. Reste que les scènes aéronautiques donnent le tournis et illustrent déjà une maîtrise des angles de vues à laquelle l’expérience cinématographique de Max Vier n’est certainement pas étrangère. 

Refusant la facilité, ce one shot s’attache à la vie d’un homme dépassé par ses rêves de gloire. Pari ambitieux pour un premier album…

Ainsi, soit-il !

Jour J : 15. La secte de Nazareth

© Delcourt 2013 - Duval & Kordey
En se lavant les mains, le gouverneur Ponce Pilate a fait le mauvais choix. Crucifiant Barabbas en lieu et place d’un certain Jésus de Nazareth, il a permis au prédicateur de soulever Jérusalem et d’attirer sur elle les foudres de l’empereur Claude et de sa Xe Fretensis. Trente ans plus tard, cette secte de fanatiques veut brûler la Ville Éternelle.

 En considérant le cours du temps comme une suite de hasards, rien n’empêche d’imaginer que ce qui est, aurait pu être tout autre. Tel est le principe de base de l’uchronie dont le scénariste de Jour J et du Grand jeu demeure l’un des spécialistes.

Toujours avec Fred Duval, Jean-Pierre Pécau revisite aujourd’hui les prémices du christianisme. Cependant, ils en modifient singulièrement l’approche puisqu’il est ici question d’un groupuscule qui, après une révolte durement matée, a essaimé au sein de toute la Romanité et cherche désormais à s’attaquer au cœur de l’Empire. Si le récit se déroule il y a un peu moins de deux mille ans, il semble devoir trouver un écho - voulu - dans l’actualité : derrière Rome, il est possible d’imaginer l’ombre de Washington… Très contemporain dans le propos, La secte de Nazareth tient toutefois plus de la traque policière que de l’analyse théologique, même si, au regard de l’Histoire, le dernier coup de glaive du centurion Gaius sonne comme un aveu d’échec !

Déjà aux pinceaux sur Le lion d’Égypte, Igor Kordey est de ceux dont la puissance des planches ne laisse pas insensible. Et si un certain manque de précision peut lui être parfois reproché, il livre ici une partition qui en privilégiant la force du trait à un réalisme forcené, n'en sert pas moins parfaitement le scénario.

Sur un concept inépuisable, Jour J souffle le chaud et le froid. Avec ce dernier volet, il semblerait que les auteurs aient retrouvé leur inspiration et offrent à ce one-shot une mise en perspective dont tous les opus de la collection ne bénéficient pas.

dimanche 8 décembre 2013

Happy birthday...


Cérémonie d’anniversaire au Petit Faucheux, où la librairie Bédélire fêtait ses 20 ans. Un bel âge qui méritait, comme il se doit, d’être marqué. 

Au menu des festivités musique et dessin ! Sur des registres divers, Frasques accompagné de Guillaume Carreau puis Chromb! (un groupe lyonnais) et Sébastien Flao ont fait le spectacle. Si l’un jouait sur un registre New Orléans (piano, clarinette/saxophone et guitare/banjo), le second (piano/synthé, saxophone, basse et batterie) évoluait sur des notes nettement plus expérimentales jouant sur ses harmonies aussi bien que sur les désaccords. Quoiqu’il en soit, le brassage proposé entre musique, dessin, vidéo et animation a fait son petit effet sur une salle comble et - à s’en référer aux applaudissements nourris - conquise par les prestations offertes. 

Une soirée de découvertes entrecoupée de quelques bulles qui étaient allées se chercher du coté de Vouvray… et de quelques figures locales (Simon Hureau, Serge Pellé, Ullcer et sûrement d’autres … que je n’ai pas reconnus !). Il y avait pire manière d’occuper son samedi soir !