dimanche 29 avril 2012

A toute vapeur !

Billet sur 12 La Douce

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Les temps changent et l'heure de la retraite approche pour l’Atlantic 12-004 et Léon Van Bel, son mécanicien-machiniste. Mais dans un pays imaginaire, qui se sacrifie à une nouvelle énergie, l’acier des locomotives est source de convoitises. Pour préserver la Douce, la dernière de sa série, Léon et Elya iront au-delà d’Altaville, dans un cimetière lointain où les reines du fer attentent d'être dépecées.
Hasard d’un calendrier qui ne permettait pas à l’un des plus célèbres duos de la bande dessinée franco-belge de pouvoir encore œuvrer de concert, ou volonté délibérée de s’atteler, seul, à une œuvre plus personnelle, 12 la Douce est entièrement réalisé par François Shuiten. Pour autant, cet album s’inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs avec cependant une petite variation puisqu’il fait une escapade dans le monde des transports.

© Casterman 2012 - Schuiten
L’œuvre du dessinateur belge est marquée graphiquement par l’évolution et les formes des villes, et humainement par les relations que les habitants entretiennent dans et avec leur cité. Ici, le lien est de même nature, les bâtiments étant simplement remplacés par l’un des fleurons de l’ingénierie ferroviaire de l’entre deux guerres. Toutefois, l’architecte qui sommeille en Shuiten n’est jamais très loin puisqu’il nous propose, via le voyage de Léon et de sa jeune coreligionnaire, une réflexion sur le développement d’une société à travers ses moyens de communication et les bouleversements qui en découlent. Au-delà de la fable industrielle, il y a surtout le combat d’un homme pour sauver ce qui lui est cher et pouvoir enfin le transmettre à Elya, pour qu’il lui survive. C’est simple et humain, car même si l’action se situe à une époque incertaine dans un pays impossible à situer, elle n’est pas sans présenter certaines similitudes avec des situations connues.

Cet ouvrage est également une première technologique, puisque sa sortie a été l’occasion de numériser et de reconstituer en 3D la fameuse Atlantic 12-004, bijou technologique du design Streamline des années 30, dont une grande partie des plans a été perdue - http://www.12-ladouce.com/ -.

Avec ses décors à la rectitude millimétrée, ses ombrages caractéristiques et sa vision néo-futuriste de la ville, François Shuiten sait également donner à ses personnages une dimension et une densité qui font l’intérêt de ses albums en général et de celui-ci en particulier.



Dans le jungle londonienne...

Billet sur l'opus 1 du Le Roi des singes : Tome 1

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Londres est en effervescence. Tandis que l’intelligentzia de la capitale s’ébahit devant un jeune aristocrate anglais qui fut élevé par des singes dans sa prime jeunesse, des femmes de petite vertu succombent les unes après les autres sur les bords de la Tamise. Coïncidence fortuite et troublante, ou rencontre savamment entretenue, faut-il voir une relation entre le tueur qui hante les bas fonds de la capitale anglaise et Lord Livingstone ?Philippe Bonifay sait habilement éviter les pièges.

© Vents d'Ouest 2012 Meddour - Bonifay
Le Roi des Singes aurait pu être une nouvelle adaptation du Tarzan d’Edgar Rice Burroughs ou bien encore une énième variation du « bon sauvage » si cher à Jean-Jacques Rousseau, or il n’en est rien ! En interprétant, plus que librement, une œuvre d’Albert Robida, le scénariste de Zoo aborde de manière très personnelle l’éternelle question sur la nature de l’Homme. Loin des clichés, avec une approche narrative basée sur le flashback, le scénario se structure autour de deux histoires en parallèle mais indissociables. D’un coté, celle d’un enfant abandonné, recueilli par des orangs-outangs, que la civilisation rattrape et essaye de formater ; de l’autre, celle de l’homme qu’il est devenu et qui lutte pour exister dans la jungle de l’aristocratie londonienne. Mais Philippe Bonifay sait aller au-delà de cette simple dualité en intégrant à son scénario, la passion d’une jeune femme à la beauté diaphane et une série de meurtres qui sonnent comme un avertissement. Ainsi, au fil des pages, dans un découpage qui parfois superpose jusqu’à 3 séquences différentes, le lecteur avance progressivement dans l’album, attentif à chaque détail, appréciant chaque dialogue, découvrant un récit captivant où s’entrelacent sensualité et brutalité, violence et douceur, grandeurs et bassesses, d’un monde qui se dit civilisé, afin de mieux oublier sa part d’animalité.

Pour assumer un tel scénario, il faut un dessinateur qui puisse en sublimer la richesse. Il ne peut être ici question de technique, mais d’émotions. Plus qu’une longue et fastidieuse description, il suffit dès lors regarder chacune des planches pour s’apercevoir de la puissance narrative et de l’expressivité du graphisme de Fabrice Meddour dont le point d’orgue reste la troublante sensualité d’Enora particulièrement mise en lumière et en valeur par Stéphane Paitreau.

Un album prenant et complexe qui s’intéresse superbement à l’animal qui sommeille en nous.


samedi 28 avril 2012

Code Rousse

Billet sur l'opus 1 d'Anna Mercury : 1 - Sur le fil du rasoir

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© Glénat 2012 Percio - Ellis
Anna-Louise Britton est une jeune femme bien singulière. Anodine, pour ne pas dire banale, lorsqu’elle vaque à ses occupations quotidiennes, elle devient, une fois franchies les portes du Projet Constellation, Anna Mercury. Avantageusement moulée dans sa combinaison rouge et noire, elle arpente alors les 9 univers parallèles qui entourent notre bonne vieille planète afin d’assurer le fragile équilibre qui permet à tous ces mondes de coexister sans s’affronter.

Avec Sur le fil du rasoir, Glénat complète sa nouvelle collection intitulée Comics. Edité sous un format intermédiaire avec une superbe couverture cartonnée signée Juan Jose Ryp, l’ouvrage attire rapidement l’œil et se laisse facilement prendre en main pour vous entraîner, sans aucune transition, au sein de l’univers sur-vitaminé de l’un des maîtres du genre, outre-Atlantique.
Rousse incendiaire, à la chevelure et aux formes plus que généreuses, Anna possède des dons qui font d’elle une arme redoutable. Plongée sans ménagement dans une aventure au rythme échevelé, la condisciple de Lara Croft n’hésite pas, elle aussi, à user de ses charmes et de ses automatiques pour convaincre. Si le scénario ne brille pas par sa profondeur, il n’en demeure pas moins efficace et habillement tourné vers deux seules choses : la mise en valeur de la plastique féminine et l’action. Bimbo vinilisée et permanentée à l’extrême, l’égérie de Warren Ellis ne laisse pas insensible et fait malheureusement passer le contexte spatio-temporel dans lequel elle évolue, au second plan. Côté dessin Facundo Percio se charge de mettre en valeur les formes de la divine rousse et sait, par une débauche d’effets visuels et par un découpage particulièrement approprié, donner mouvement et dynamisme à tout ce que la jeune femme touche et … détruit.

Parue initialement chez Avatar Press dans sa version originale, les aficionados du genre adoreront cette version française, les amateurs du style franco-belge peut-être moins, mais ils devront convenir que l’ensemble est loin d’être déplaisant.

samedi 21 avril 2012

So far away ...

Billet sur l'opus 1 de Far Albion : 1 - L'Eveil

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Après la destruction de la Terre, l’Humanité a migré dans l’espace et derrière le Mur, elle se reconstruit en colonisant de nouvelles planètes. L’Angleterre est ainsi devenue Far Albion et alors qu’ils doivent désormais assurer, seuls, leur protection, les Albians se trouvent confrontés à un ennemi inconnu, venu des tréfonds de la Stella incognita. Pour la première fois l’Homme va rencontrer une autre forme de vie !

© Soleil Productions 2012 Nhieu - Sala
Encore une nouvelle série de science fiction diront les plus blasés. Certes, certes mais celle-ci à un petit quelque chose de plus qui, sans être transcendant, ne la rend pas moins sympathique. Ce premier album sait rapidement définir son contexte géo-spatial et présenter, de manière plaisante, sa galerie de marines du Force Recon. Bien évidement, ces derniers sont relativement stéréotypés, mais toutefois pas assez pour lasser, et suffisamment pour augurer de confrontations et de space-romance à venir. Ainsi, dans ces vingt-neuf premières planches, Jean-Luc Sala (Spywest, Cross-fire) sait donner crédibilité et cohérence à son scénario. Aussi, lorsque dans le dernier tiers de l’album, il bascule dans ce qui pourrait-être une histoire parallèle, le lecteur comprend rapidement qu’il n’en est rien et qu’il s’agit de deux volets d’une même histoire qui se joue dans les environs de Balmoral.

Bien mis en valeur par le trait d’Emmanuel Nhieu qui sait donner le mouvement nécessaire pour dynamiser les combats et les rixes spatiales, Far Albion revisite agréablement l’une des plus fameuses légendes de l’ancienne Angletrerre. Tout juste pourrait-on regretter un dessin qui ne va pas assez dans le détail.

Un album léger qui se lit sans peine, et qui offre un final surprenant mais qui, a posteriori, n’est pas sans une certaine logique…





Dieu est en chacun...

Billet sur l'opus 1 du Livre de Skell : Chant 1

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Skell est une exécutrice. À elle et ses consœurs, revient le droit de pourchasser les hérétiques, ceux qui arrivent à se soustraire à l’emprise de Steh-Vah. Cependant, même si la foi guide son bras, son esprit peut vaciller. Alors ses certitudes se transformeront en doutes et la recherche de la vérité fera d’elle une paria, indigne de porter une part du dieu tout puisant…

© Quadrants 2012 Servain - Mangin
Valérie Mangin aurait-elle des problèmes avec les démiurges en général et leurs représentants en particulier ? Après Trois Christs, album singulier, mais non dénué d’intérêt, la voici revenue sur le terrain de la théologie appliquée, avec une approche peu courante : celle de la rédemption inversée. Ainsi, son héroïne - bras armé du dogme - s’interroge et est ainsi confrontée au doute ; à son âme défendante, elle se trouve entraînée dans un combat qu’elle subit, plus qu’elle ne le veut. Son destin s’inscrit alors dans une troublante prophétie, somme toute très religieuse ! Parallèlement, la compagne de Denis Bajram utilise plusieurs subtilités scénaristiques originales qui donnent corps et épaisseur à son scénario, sans pour autant tomber dans la facilitée et l’athéisme primaire : l’eucharistie prend, ici, une tournure pour le moins radicale, puisque les fidèles reçoivent dans leur chair - sous forme d’un implant cervical - une part de la déité qu’ils vénèrent.

Le Livre de Skell sait garder une certaine distanciation avec les choses d’essence divine, en se situant délibérément dans un cadre post-apocalyptique, un monde de guerre où la rationalité des armes possède un certain poids. Dans ce registre, le dessin - comme la couleur - de Servain est parfaitement approprié. Son approche graphique lui permet d’ancrer ses personnages dans un semi-réalisme convaincant, tout en ayant une approche beaucoup plus libre des décors, donnant ainsi à l’album une tonalité oppressante en harmonie avec la main-mise de Steh-Vah sur ses ouailles.

Skell est du côté de la foi et du droit, du côté d’un dieu censé apporter la plénitude à ses adeptes… tout en leur ôtant leur libre arbitre. En ce XXIème siècle que Malraux annonçait comme spirituel, la thématique ne manque pas d’intérêt !

dimanche 15 avril 2012

Drôles d'Oiseaux

Billet sur Birdy'sL'alter-native

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© Clair de Lune 2012 - Nolwen
Six drôles d’Oiseaux arpentent un désert unicolore. Ces Novices conduits par Ouzh caressent la folle ambition de devenir, eux aussi, des Initiés. Pour cela, ils implorent Gwez-Meur l’arbre aux plumes de couleur en espérant que l’un d’entre eux devienne un Passeur ! Mais lequel ?

Dans une librairie, le hasard fait parfois curieusement les choses et permet de jolies découvertes auxquelles rien de prédisposait. Birdy’s de Nolwen est l’une de ces coïncidences qui, lorsqu’elle se produit, vous fait dire qu’un bon moment de lecture tient parfois à peu de choses.

Autant le préciser tout de suite, cet album est inclassable… mais terriblement prenant. Il nous entraîne dans un pays terne et minéral où le gris règne en roi et où d’étranges oiseaux dépourvus de plumes et d’ailes sillonnent, en file indienne, une étendue sans fin. Ce qui, au fil de la lecture, se relève comme un périple initiatique, les conduits au pied d’un arbre couvert de plumes aux chatoyantes couleurs : Gwez-Meur. Commence alors une curieuse cérémonie pour ces OVNI ornithologiques. Dans une frénésie de couleurs et une débauche d’efforts, l’un d’entre eux, transporté par l’extase procréatrice, deviendra Passeur ! 

Sobre et terriblement poétique sans pour autant être pompeux et abscons, Birdy’s est une jolie métaphore, superbement illustrée, où la mise en couleurs tient un rôle pour le moins primordial et inhabituel. Cet album surprenant, constitue une belle réflexion sur soi-même, et sur la place que chacun veut se donner dans un monde régit par des règles qu’il peut être difficile de comprendre et/ou de transgresser : une étrange histoire dont l’absurdité trouve un certain écho dans notre quotidien. Mais, au-delà de ses longues séquences toutes en images et de ses dialogues plein d’à propos, Birdy’s est aussi une aventure sensorielle avec ses pages glacées, ses couleurs mates et sa couverture délicatement rembourrée. 

Un album tout en douceur, fin et émouvant : superbe !

lundi 9 avril 2012

La rencontre de deux Géants !

Billet sur Titanic d'Attilio Micheluzzi

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Avec Titanic, Mosquito rend, une nouvelle fois, hommage à l’un des maîtres incontestés de la bande dessinée transalpine : Attilio Micheluzzi.

© Mosquito 2012 - Micheluzzi
Auteur complet, à la fois dessinateur hors-pair et scénariste accompli, cet ancien architecte tardivement reconvertit au 9ème art, s’illustre par le classicisme et la finesse sans pareil de son trait ; lui, plus que quiconque, stylise l’élégance féminine et confère à ses héroïnes cette nonchalance aristocratique dont le summum est atteint dans Petra chérie. Narrateur rarement égalé, dialoguant avec ses propres héros comme avec le lecteur, il instaure ainsi une complicité et une relation aux personnages peu commune ; tout comme son dessin qui retranscrit avec un réalisme saisissant, l’ambiance surannée et le parfum désuet de ce début de vingtième siècle.
Titanic est, avant toute chose, une galerie de portraits : synthèse à huis clos des turpitudes de l’âme humaine où les esprits les plus tortueux, généralement masculins, se mêlent à une naïveté toute féminine ! Sur ce bateau où le faste des 1ères classes côtoie, sans jamais la rencontrer, la pauvreté du pont des 3èmes, Attilio - en conteur avisé – nous offre une jolie satire sociale. Mais au-delà de personnages peut-être (trop) stéréotypés, la simplicité et la sobriété du dessin, tout comme la justesse du traitement en N&B, donnent à cette histoire une dimension théâtrale qui trouve, dans le destin tragique du fleuron de la White Star, un cadre qui en décuple l’intensité dramatique. Toutefois, un regret subsiste, celui de ne pas avoir vu cet album dessiné depuis les sous-ponts du géant des mers, là où la misère restait confinée, en attentant de voir Liberty Island.

Décidément, Attilio Micheluzzi est un grand dessinateur et un formidable narrateur. Bref, un artiste.

dimanche 1 avril 2012

Une bien jolie chanson...

Billet sur l'opus 1 de Kililana song1 - Première partie

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Naïm, 11ans, passe ses journées à déambuler dans les rues de Lamu avec ses copains, à commercer afin de manger et, surtout, à fuir son frère qui ne pense qu’à l’envoyer à la madrasa. Mais dans un Kenya où s’entrechoquent toutes les contradictions, les destins s’entremêlent au grès du temps qui passe et Naïm croisera la route d’un authentique fils de pute, capitaine de surcroît et d’un vieil homme, dernier descendant d’une lignée entretenant le souvenir d’un guerrier légendaire.

© Futuropolis 2012 - Flao
Kililana song est un conte moderne venu d'un Kenya peuplé de Djinns et de guerriers dont la mémoire perdure dans les arbres ; un pays où chaque année le vent du travail donne à chacun de quoi subsister jusqu'à la saison prochaine.
Benjamin Flao (nous) plonge dans ses souvenirs de voyage et nous entraîne dans un chassé-croisé de destins qui sont autant de facettes d'un même pays. Des ruelles cosmopolites de Lamu, à la chaleur lourde de la savane, aux brises légères du Pacifique, cet album est une douce ballade en terre africaine, continent particulièrement à l'honneur ces derniers temps (Mary Kingsley, Africa Dreams, Aïr, L'appel des origines…).
Au delà d'un scénario qui s'écoule comme un fleuve tranquille et qui sait, nonchalamment, vous emmener là où il veut, le dessin à l'aquarelle (comme le découpage) donne au premier opus de ce diptyque un faux air de carnet de voyage des plus agréables.

Un très bel album, sensible, tout en humanité et subtilité qui sait mettre en lumière la simplicité et la complexité d'un pays où la pauvreté et l'opulence cohabitent sans pour autant se mélanger... Et au milieu de ce pays pousse un arbre magique, gardé par un vieil homme.


Heureux qui, comme Black Crow, a fait un beau voyage...

Billet sur l'opus 3 de  Black Crow : 3. L'arbre aux Hollandais

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Après avoir libéré son équipage Black Crow poursuit Van Steenvoorde à travers la savane. Obnubilé par son trésor, le vieux flamand a finalement trouvé le fameux arbre aux Hollandais au pied duquel sa troupe s’apprête à bivouaquer. Soudain, surgissant de nulle part, des guerriers masqués massacrent impitoyablement les mercenaires dont un petit nombre ne doit son salut miraculeux qu’à l’astrolabe que Van Steenvoorde porte autour du cou. Fidèle à ses engagements  mais aux prix de mille dangers, Black Crow parvient à arracher son commanditaire des griffes de ses ravisseurs, mais le vieux fou, plus préoccupé par les richesses que renferme la mystérieuse citée dont il est le prisonnier, finira par en perdre la tête et accessoirement la vie. Insensible à l’immortalité qui s’offre à lui, trahi et désormais seul, Black Crow s’en retourne vers le Revenge afin de prendre la mer et fuir ce pays où sont mortes ses dernières illusions.

© Glénat 2011 - Delitte
Au-delà des qualités intrinsèques aux albums de Jean-Yves Delitte sur lesquelles il est inutile d’épiloguer, ce dernier opus souffre de quelques petits défauts qui trouvent ici une résonnance particulière. Tout d’abord, il y a une certaine facilité, coupable, dans ce qui aurait dû constituer le point d’orgue du diptyque, à savoir la localisation et la nature du trésor tant convoité. Et si l’histoire se déroule parfaitement jusqu’à la trentième planche, la suite apparaît pour le moins… anachronique En effet, passe encore de localiser le dénouement de l’album dans une cité oubliée (pourquoi pas ?), mais, il est surprenant que le scénario ne s’attache pas à expliquer l’existence de cette colonie grecque surgit là… uniquement pour servir de décor. L’art de l’ellipse a des limites ! Toutefois, ne nous y trompons pas, ceci n’altère en rien la compréhension de l’histoire, ni la qualité de l’album, mais ce qui serait passé inaperçu chez bon nombre d’auteurs prend, chez Jean-Yves Delitte, une toute autre importance. A côtoyer une certaine forme d’excellence, le lecteur lambda fini par prendre de mauvaises habitudes. Aussi convient-il de noter certaines variations, certes minimes, dans la qualité du graphisme de certaines cases, voire des doubles page ainsi qu’un manque de fluidité de certaines scènes, de combat notamment, ce qui est d’autant plus perceptible et troublant que Jean-Yves Delitte est réputé pour la précision et le réalisme de ses dessins.

La critique est aisée, mais l'art est difficile a dit un certain Philippe Néricault. Certes, certes... mais L'affection aveugle raison dit le proverbe ! Mille excuses, Monsieur Delitte pour ces petites observations sans conséquence, que celles-ci ne fassent pas oublier la qualité de cette série (en particulier) et de vos albums (en général).