samedi 31 août 2019

V-Girls

1. Incatare 
 
© Soleil 2019 :  Pécau & Ukropina
Quel point commun entre la plus belle femme du monde, une pilote émérite, l’eau et l’air ? Le dénouement de la future Seconde Guerre mondiale. Élémentaire mon cher Fleming ! 

Historien et scénariste BD, Jean-Pierre Pécau n’a pas son pareil pour réécrire l’histoire à sa manière.Construisant ce premier volet autour d’une Hedy Lamar qui de l’Extase aux prémices du Wi-Fi s’assume pleinement, le père des Archontes décline, sous la forme d’un triptyque, une nouvelle série où se mêlent éléments historiques, fantastiques et uchronie, le tout sur fond hollywoodien. Les cartes sont connues, mais rebattues habilement pour une nouvelle partie dont la mise en œuvre échoit au duo Jovan Ukropina (dessin) & Hugo Facio (couleurs) qui se révèle parfaitement efficace et ce aussi bien dans l’expressivité et la physionomie des protagonistes que l’approche très cinématographique des décors. 

Les amateurs de jolies égéries au caractère trempé, de technologies retro-futuriste et de dimensions parallèle seront ravis. Pour les autres, Incatare constitue une mise en bouche qui laisse présager d’une suite des plus consistantes !

lundi 12 août 2019

DEVOIRS DE VACANCES

La plage, un fauteuil en terrasse, une bouteille de blanc du pays et beaucoup d’albums en retard. Les devoirs de vacances… c’est sacré !  


Le Dieu vagabond

© Sarbacane 2019 : Dori
Eustis est satyre banni du pays des Dieux pour avoir osé importuner une protégée d’Artémis… Depuis il erre en quête de rédemption. Un univers graphique haut en couleurs où les références aux illustres ainés sont légions - Van Gogh, Winsor McCay, Klint, Hokusai… pour n’en citer que quatre ; une histoire à l’absurdité onirique qui permet d’aborder, au travers du prisme mythologique, des thématiques des plus contemporaines…

Voici résumée en quelques mots l’œuvre inclassable de Fabrizio Dori, un conte qui emmène le lecteur dans une réalité où les parallèles avec la nôtre sont trop nombreux pour être fortuits. 

À découvrir et à apprécier. 


L’âge d’or

© Dupuis 2018 : Moreil & /Pedrosa
Un graphisme somptueux travaillé telles les enluminures, une recherche dans le choix des couleurs qui ne doit rien au hasard, un récit digne des plus belles chansons de gestes… le dernier album de Cyril Pedrosa et Roxanne Moreil, est un petit bijou. 

Que dire de plus ? Rien !

L’âge d’or est une immersion dans les contes d’antan mais avec une touche de modernité qui en fait tout le charme et l’à propos. 

La seule question qui vaille désormais est : à quand la suite ? 


Orwell 

© Dargaud 2019 : Christin & Verdier
Journaliste, écrivain, homme de conviction, Éric Arthur Blair, alias Georges Orwell ne se résume pas uniquement à 1984. Issu de la bonne bourgeoisie anglaise, il n’hésita pas, pour écrire ses articles, à s’immerger dans les bas-fonds de Londres ou de Paris et d’aller combattre sur le front de Catalogne. Homme de gauche mais qui s’avait se montrer acerbe et critique envers toute les formes d’oppression qu’elles soient coloniale ou soviétique, il livre avec sa dernière œuvre une vision prémonitoire qui aujourd’hui fait toujours référence. 

Pierre Christin écrit ici une angiographie qui tente quelque part de mettre Orwell entre Malraux et Hemingway en oubliant les côtés sombres d’un homme qui, à n’en pas douter, en avait.

Sur une telle partition, Sébastien Verdier pose un dessin en noir et blanc au réalisme historique, simplement rehaussé de quelques incrustations en couleurs et d’interventions de guest stars.

Orwell, prouve que – sur certaines histoires - la BD et la littérature se complètent …. l’une pouvant donner envie de lire l’autre ! 


Sur nos ruines 

© Casterman 2019 : Jarbinet
Dernier volet du quatrième diptyque d’Airborne 44 avec un Philippe Jarbinet au sommet de son art. 

Ce huitième album revient sur l’un des derniers épisodes de la seconde Guerre mondiale, celui qui vit américains et soviétiques se livrer à une course sans merci aux savants nazis. Ainsi, il apparait que l’honneur n’est pas forcément une valeur cardinale en cas de guerre et que la vie des uns ne vaut pas forcément – aux yeux des états-majors – la vie des autres. 

Un dessin réaliste jusqu’au dernier bouton de vareuse et un récit qui rappelle que la conquête spatiale doit certainement un peu à ceux qui sont morts dans les chaines de montage de Mittelwerk. 


Rencontres obliques 

© Le Lombard 2018 : Clarke
4 planches, 16 cases, pour une histoire courte. 

25 histoires pour un album sombre autant qu’inquiétant. 

Des abimes de l’inconscient aux profondeurs des nuits de cauchemar, ces saynètes effrayantes par la sobriété de leur mise en scène ou la profondeur hypnotique de leur noir & blanc se nopurrissent avec une délectation morbide de nos angoisses intimes. 

À lire la lumière allumée et surtout pas avant de se coucher. 


Le Sang des cerises - Livre 1 - Rue de l'Abreuvoir 

© Delcourt 2018 : Bourgeon
De la vieille Europe aux terres africaines en passant par les bayous américains, en près de 40 ans François Bourgeon aura fait rêver et voyager près de deux générations de lecteurs. Voici Zabo à Paris à l’enterrement de Jules Vallès. La commune n’est plus, mais elle hante encore le cœur de ceux qui en furent. 

Lire Les passagers du vent vaut bien des cours d’histoire et Rue de l’abreuvoir n’échappe pas à la règle. Les dialogues en breton et argot originaux, un Paname d’époque… cet album est une plongée dans l’urbanité parisienne et dans un Montmartre d’une autre époque où la violence et la misère avaient valeur de loi. 

Toutefois à trop vouloir entremêler - dans une authenticité difficilement appréciable pour les néophytes - la petite histoire des gens de la butte avec la Grande, celle des débuts sanglants de la IIIe République, constitue un écueil, tout comme ces physionomies qui, au fil des ans, connaissent une lente évolution vers plus de figuration. 

Cependant, il faut bien reconnaître que la magie opère toujours et que cette série est indéniablement l’une des références hexagonale en la matière et ce n’est que pure justice. 


Hugo Pratt, un gentilhomme de fortune 2. Venise

© Vertige Graphic 2011 : Cossi
Cette biographie d’Hugo Pratt est à l’image des aventures de Corto entre plausible et rêverie. 

Dans une ambiance qui rappelle les aventures de l’illustre marin et un Venise qui tient les rôles titres, Paolo Cossi retrace la jeunesse insouciante et dilettante de l’auteur italien et la met indiciblement en parallèle de la vie de son allégorique héro. 

Respectant l’esprit du maestro, Paolo Cossi réalise un album qui ravira les amateurs de l’emblématique marin et de Venise.  


Renato Jones #2 

© Akileos 2018 : Kaare
La croisade de Renato Jones touche à sa fin dans une démesure qui vire, comme le concède son créateur, à la caricature… car la réalité semble dépasser cette pure fiction, du moins de l’autre côté de l’Atlantique. 

Critique au vitriol du capitalisme américain dopée aux psychotropes et stéroïdes divers, Freelance, est une débauche d’effets visuels et de considérations sur l’état de dépravation du monde. Cela part un peu dans tous les sens, n’est pas forcément des plus lisible… voire compréhensible, mais cette œuvre militante possède un coté prémonitoire dans sa surenchère qui ferait frémir.