dimanche 25 septembre 2011

Préfiguration de l'Enfer...

Billet sur l'opus 4 de l'univers de Block 109 : New-York 1947

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8 mai 1945, l’Allemagne déclenche le feu nucléaire sur la côte Est des Etats-Unis et 2 ans plus tard, après que le Nouvel Ordre Teutonique ait expérimenté une arme biologique sur Manhattan, un mystérieux commando allemand progresse dans la 5ème avenue en ruine. Mais, ce qui ne devait-être qu’une simple mission d’extraction va très rapidement tourner au jeu de massacre.
Nouvelle uchronie pour le duo Brugeas/Toulhoat qui après avoir exploré - au printemps - les frondaisons de la forêt vierge africaine vient désormais hanter les décombres de la mégalopôle nord-américaine.New-York 1947 est très justement mis en scène par Vincent Brugeas et ses héros sont plus près du pathétique que de l’héroïque. Loin de faire l’apologie de la virilité guerrière, cet album illustre - à sa manière - ce que la guerre peut faire de pire que ce soit du coté des supposés vaincus ou de celui des présumés vainqueurs. Véritable street movie post apocalyptique, cet album nous entraine frénétiquement vers l’Enfer dans un chaos où s’entremêlent des hommes chimiquement ou viralement modifiés, des soldats perdus, des victimes des circonstances ou de la guerre et … le petit chaperon-rouge !
Parallèlement, il est difficile de dissocier le scénario de Vincent Brugeas du travail tout en puissance, en mouvements ou en ombres de Ronan Toulhoat. Mais la force de son dessin ne se s’apprécie qu’au regard des études et croquis - somme toute très classiques - du making-off : la précision est dans les décors au trait quasiment technologique… l’impression est dans les personnages au graphisme plus instinctif, privilégiant l’essence au réalisme morphologique.
Il existe une réelle complémentarité entre ces deux auteurs qui fait toute la singularité et la qualité de cet album. De la BD d’auteurs qui possède une sacrée personnalité.

jeudi 22 septembre 2011

Fleur perdue à la Perle Pourpre

Billet sur le tome 1 de Chimères(s) 1887La perle pourpre

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Si cette fin de XIXème siècle se veut glorieuse et industrielle à l’image des travaux titanesques entrepris par Ferdinand de Lesseps à Panama, la vie quotidienne de certaines n’est pas un long fleuve tranquille. Chimère, du haut de ses 13 ans, va découvrir dans les mains de Madame Gisèle la dure réalité des maisons closes qui, même si elles sont de luxe, ne sont pas épargnées par le sordide.

Chimère a connu une enfance malheureuse et son adolescence, dans un bordel huppé, ne risque guère d’être meilleure. Toutefois, deux bonnes fées, Christophe Pelinq (alias Arleston) et Mélanie Turpyn (alias Melanÿn) se sont penchées sur son berceau. Si l’histoire se centre volontairement sur notre jeune héroïne et sur son parcours au sein de l’élite des péripatéticiennes parisiennes, Peling et Melanÿn vont plus loin puisqu’en parallèle, ils développent une autre histoire, centrée sur le canal de Panama. Sans être grand prophète, le lecteur sent bien que tout ce petit monde devrait se retrouver dans les boudoirs feutrés de la Perle Pourpre pour quelques scandales mêlant sexe, corruption et affairisme. A noter les dialogues dont la pertinence se doit d'être signalée. Pour sa part, le dessin de Vincent - dont l’Ecole Capucine a fait l’objet d’un superbe tirage de tête de la part de Laurent Hennebelle - n’est pas en reste, les femmes sont belles et pleine de personnalité et les hommes guère à leur avantage. Avec un trait fin, anguleux mais d'une grande fluidité, il dépeint sans pudeur ni misérabilisme le monde certes feutré mais terriblement pernicieux de ces lupanars parisiens de la IIIe République.
Cet album conjugue qualité du graphisme, justesse de la mise en couleur, à propos des dialogues et densité du scénario… de biens beaux avantages qu’il convient désormais de savoir faire fructifier.

samedi 17 septembre 2011

Un festival qui monte qui monte....

7ème édition de A Tours de Bulles, les 16/17/18 septembre 2011 à TOURS (37)

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Le festival aurait pu commencer sous de meilleurs auspices : défections à la chaine, auteurs présents seulement le samedi avec  nombre limité de dédicaces et possible tirage au sort de tickets, ciel nuageux et temps incertain…
Mais il existe un Dieu pour les organisateurs  du festival car finalement les choses se sont plutôt bien déroulées ce samedi : De Pins a réalisé finalement plus d’une quarantaine de dédicaces, cela n’a pas été la cohue chez Aubin, Florent Maudoux et Xavier Roth-Fichet ont fait un véritable tabac, Jean Solé a fini par arriver et Marc-Antoine Mathieu a fait une rapide mais remarquée apparition …. et j’en oublie (Poitevin, Pellé, Ullcer, Capucine ...).
Bref, une 7ème édition des plus honorables qui se termina (ce samedi) en apothéose par une séance de dédicaces (petites) et signatures de François Schuiten et Benoit Peeters à Fondettes (fallait trouver !) suivie de leur spectacle … mais là, je m’abstiendrais de commentaires car je ne suis pas certain d’avoir vraiment compris où les auteurs voulaient nous emmener !

dimanche 11 septembre 2011

Sur la trace de ces coureurs des bois

Billet sur l'album Frenchman de Patrick Prugne

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Des vertes pâtures normandes, aux lointaines contrées du Nouveau-Monde, les arcanes du destin vont faire d’Alban Labiche l’un de ces frenchmen, coureurs des bois en rupture de ban, qui servirent de guides à la jeune Nation américaine dans sa conquête de l’Ouest.

Après Canoë Bay réalisé en 2009 avec Tiburce Oger, Patrick Prugne décide aujourd'hui de partir seul vers les terres de Louisiane.

Graphiquement, ce one-shoot de 74 planches tout en couleur directe (aquarelle principalement) est simplement superbe. Si le volet normand des aventures d’Alban apparaît nécessaire, il est perceptible que Patrick Prugne est plus à l’aise dans  les sous-bois nord-américains que dans les pâturages normands. Aussi, l’album prend t-il toute sa dimension dès que notre jeune héro pose le pied sur les terres du  nouveau monde et s’enfonce dans des contrées à la sauvage beauté. La principale qualité du graphisme de Patrick Prugne, au-delà de son réalisme et de sa mise en couleur est de savoir rendre compte de l’essence des paysages : là où les colons apparaissent en intrus, les Pawnees se fondent en harmonie dans la nature et incarnent la liberté. Quelque peu rousseauiste, cette approche donne cependant lieu à des planches remarquables où le dessin l’emporte sur le texte et ce pour notre plus grand plaisir visuel.

Récit plein d’humanisme et magnifiquement illustré, Frenchman est l’un des albums les plus attendus de  cette rentrée et force est de reconnaître qu’il est à la hauteur des espoirs mis en lui. Un regret toutefois, il ne se dégage pas de cet album toute l’intensité attendue… la faute peut-être à un (relatif) manque de contrastes au niveau de la reproduction des couleurs !

Quoiqu’il en soit ne boudons pas notre plaisir à suivre la trace de ces coureurs des bois…


Les planches originales et des croquis préparatoires de "Frenchman" font l'objet d'une exposition du 24 août au 1er Octobre 2011 à la Galerie Daniel Maghen

Rien que pour Hel

Tout amateur de BD possède dans sa collection quelques albums pour lesquels il a une préférence toute particulière… L’automne arrivant, il est parfois tentant (vu le mauvais temps) de les relire, juste pour le plaisir. Aujourd’hui, à tout seigneur tout honneur : Hell d’Anne Renaud. Certainement mon album préféré tant par sa qualité que par sa dédicace (l’une des plus belles de ma modeste collection).

Cette BD est une pure merveille.

Anne Renaud fait preuve, pour un  premier album (!), d’une maîtrise rare et d’une efficacité incroyable. Tout est mis au service du mouvement et du réalisme : la séquence du combat entre Hel et le Minotaure est, à elle seule, un petit bijou de précision et de cadrages… Ajoutez à cela un scénario qui sait innover sur une thématique pourtant très classique et vous obtenez un superbe album qui mériterait un tirage de tête.
 
Reste à attendre patiemment la suite …

samedi 10 septembre 2011

Vive la rentrée !



Soleil de plomb pour la rentrée de septembre… de quoi regretter d’être parti en juillet !

Heureusement un crochet par mon libraire préféré me réconcilie avec cette période qui rime généralement avec tiers provisionnel, impôt foncier et rentrée scolaire.

L’opus … 23 de L'Histoire secrète, Zombillénium tome 2, Ella Mahé n° 3, Dorian Gray en toilé chez Canal BD, Airborne 3, Frenchmen de Prugne, le nouveau Block 109, Chimère(s) (nouvelle série au dessin prometteur)… autant d’albums  prestement achetés dans l’attente fébrile d'un week-end pluvieux !

Décidément, la rentrée a parfois du bon...

mardi 6 septembre 2011

Sur les traces de la Princesse sans nom

Billet sur le tome 3 d' Ella Mahé : 3 - Celle qui n'a pas de nom

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Ella Mahé  traverse le désert du Sinaï sur les traces de la Princesse aux yeux vairons. Arrivée au monastère de Saint Catherine, pour consulter un ancien manuscrit d’Ascelin d'Aiguiller, elle apprend que le précieux ouvrage a été dérobé…
Tout a été dit sur Maryse & Jean-François Charles et l’important dans cet album, comme dans les précédents, est ailleurs.
Faire intervenir un dessinateur tiers sur les flashbacks historiques constitue un artifice subtil qui renforce la dichotomie présent/passé et facilite l’insertion d’une histoire dans l’histoire. Mais ce subterfuge ne peut pleinement fonctionner que si les deux dessinateurs possèdent des styles, certes différents,  mais avant tout complémentaires.  Dans le cas présent, le choix de Brice Goepfert (qui préside avec Daniel Bardet à la destinée des chemins de Malefosse depuis 2005) s’avère judicieux tant par la qualité de son graphisme que par le réalisme historique de son dessin. A vrai dire et pour la première fois dans cette série, les 36 planches intérieures font (presque) passer les aventures d’Ella Mahé au second plan. La raison en est double : d’abord,  le dessin de Brice Goepfert submerge le lecteur par sa force et sa précision ; ensuite le récit très introspectif de l’épopée d’Ascelin d’ Aiguiller interpelle  indéniablement : sûre de ses certitudes envers ceux qu’il était venu combattre, il prend progressivement la mesure du chemin qu’il lui faut encore parcourir pour pouvoir assumer ses choix même les plus douloureux.
Un bien bel  album qui  permet d’aller au-delà de la simple lecture récréative... Certainement  l’album le plus abouti de la série.

dimanche 4 septembre 2011

The Pandora game...

Billets sur le tome 23 de L'Histoire secrète : 23 - Absynthe

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Depuis des millénaires grâce au pouvoir de 4 cartes d’ivoires, Aker, Reka, Dyo et Erlin manipulent  le destin de l’Hunamité. Toutefois, le temps et les luttes intestines érodent progressivement le pouvoir des Archontes…..

Après être avoir traité 5000 ans d’Histoire en 7 albums,  le duo Pécau-Kordey s’attarde depuis une quinzaine d’albums à notre histoire contemporaine et nous en livre une version quelque peu différente de celle inscrite dans les manuels scolaires… et là réside (tout) l’intérêt de cette série.
En effet, en s’ancrant dans la réalité des événements récents, Jean-Pierre Pécau nous emmène dans les arcanes de l’Histoire pour nous donner une toute autre interprétation que celle communément admise. Mais au-delà d’une belle maîtrise de la chronologie de ces dernières décennies, il possède également un savoir-faire en matière d’écriture de scénario qui rend chaque album fluide et captivant à lire. Mais cette série ne serait pas ce qu’elle est sans la puissance (parfois difficilement canalisée) du dessin d’Igor Kordey et sa capacité à saisir l’essence de chacune des époques abordées … du grand art.
Dans ce 23ème opus, les cadavres que sème l’énigmatique Pandora servent de fil rouge à l’un des épisodes les plus denses et prenants de la série. Moins historique et plus ésotérique que les albums précédents, Absynthe ne semble pas pour autant annoncer l’emballement final puisqu’une trentaine de tomes serait prévu ! 

Espérons que la qualité sera toujours au rendez-vous !

samedi 3 septembre 2011

Pour quelques graines de plus...

Billet sur le tome 2 de Vents contraires : 2 - Moissons rouges

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Le land-grabbing est une réalité économique  et au-delà de l’indépendance agro-alimentaire affichée, il y a d’autres enjeux  : stratégiques et financiers…  De quoi  attiser bien des convoitises !

Sur ce constat, Régis Hautière développe un scénario sans à-coup, ni temps mort. Ce véritable thriller impose son rythme en se jouant judicieusement  des séquences d’action et de narration et en disposant ça et là quelques indices qui emmènent progressivement le lecteur vers le dénouement final. C’est fluide avec juste ce qu’il faut de faux-semblants pour maintenir le suspens. Coté graphique rien à dire, le dessin d’Ullcer sait rendre compte de l’épaisseur que Régis Hautière donne à ses personnages. Tout juste regretterais-je un petit manque de fluidité dans les séquences d’actions.
Un album complexe et captivant qui pousse à en savoir plus sur un sujet émergeant qui  façonnera le monde de demain...
A lire.

Ullcer est annoncé à Tours de Bulles les 17 et 18 septembre 2011

vendredi 2 septembre 2011

Un nouveau cycle pour l'ordre des Dragons

Billet sur le tome 1 de L'apogée des dragons : L'héritage ancestral


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La deuxième Guerre mondiale s’achève en Europe. Mais dans l’ombre, l’ordre des Dragons et le peuple de Thulé continuent leur combat millénaire…

Présenté comme le spin off de l’Ordre des Dragons, cette nouvelle série en est en fait la suite… mais désormais Eric Corbeyran en écrit le scénario.
Exercice périlleux et délicat que de reprendre une telle série mais force est de reconnaître que le prolifique Eric Corbeyran se fond parfaitement dans l’univers de Jean-Luc Istin … aussi la continuité de l’Ordre des Dragons est-elle préservée.
Le changement dans la continuité pourraient dire certains et il n’y a pas à s’en plaindre ! En effet, « L’héritage ancestral» est, certes, un album de transition mais il offre une densité qui met rapidement en place ses personnages et rentre directement dans le vif du propos. A priori, nous devrions rapidement en savoir plus sur les membres de la Loge de Thulé et sur les Promères… mais gageons qu’Eric Corbeyran saura distiller ses effets avec parcimonie afin de maintenir le suspens et nous offrir un nouvel album, aussi riche et bien construit que celui-ci !
Pour Denis Rodier, l’exercice est plus facile car après la brève incursion d’Elia Bonetti, il retrouve ses personnages. Et le résultat est des plus convaincants puisque les 46 planches qu’il dessine et met en couleur sont d’une grande qualité : tout est pensé et maîtrisé… Dès lors, il est difficile de trouver à redire… tout juste serait-il possible de regretter un (très) léger manque de fluidité dans certaines postures ou mouvements !

Un album qui ouvre ce cycle sous les meilleurs auspices !