samedi 10 mars 2012

Une gueule cassée et une vie brisée

Billet sur Pour un peu de bonheur : 1 - Félix

Lien avec le site BDGest et le site Planète BD (à paraître)


Marqué à jamais par une guerre qui a tué tous ses amis, Félix Castelan revient, après 5 ans d’absence dans son village natal des Pyrénées. Mais beaucoup de choses ont changé depuis son départ : son fils a grandi, sa femme l’a trompé, un obus lui a arraché la moitié du visage et depuis peu un mystérieux tireur exerce ses talents sur les animaux de la commune.

© Bamboo 2012 - A.Dan & Galandon
Il existe des sujets dans lesquels scénariste et dessinateurs peuvent trouver une inspiration pour ainsi dire illimitée : la Première Guerre mondiale est manifestement de ceux-là !  Sans aller jusqu’à parler d’effet de mode, il convient de reconnaître qu’au cours des derniers mois, nombre d’albums et pas des moindres ont eu comme cadre ou comme thème central la Der des Ders. Ainsi sans souci d’exhaustivité, peut-on citer: Le soldat inconnu vivant, Le pilote à l’edelweiss, Ambulance 13, Notre mère la guerre, Vie tranchées, Papeete 1914….
Alors, encore un album sur 14-18 ? Peut-être !
L’intérêt de Pour un peu de bonheur est d’évoquer la Grande guerre, de manière indirecte en jouant  sur un registre pour le moins inattendu. Laurent Galandon (actuellement dans le feu de l’actualité avec le 2ème tome des Innocents coupables) choisit ainsi de traiter le retour au pays de ceux qui vécurent l’enfer des tranchées. Sobrement, habilement, en se jouant des clichés (les commères, l’ivrogne débile, le curé humaniste, le flic parisien…) mais sans en abuser, il brosse un portrait  peu valorisant de cette France rurale pour laquelle Felix Castelan est désormais un étranger. Ainsi, avec modestie et simplicité, il aborde  des thèmes forts  comme le  regard des autres et de soi-même face à l’infirmité, l’amour trahi et le pardon, le temps et les amis perdus. Mais en scénariste averti, il sait également donner à cette histoire du relief en mettant en scène un autre Poilu, Henri Nivoix, policier manchot rescapé de Verdun, qui enquête sur un mystérieux tireur.
Au-delà d’un scénario particulièrement réussi, Alexandre Daniel sait, par un trait et une couleur particulièrement appropriés, rendre compte de la complexité des personnages et de leurs sentiments… A l’évidence dessinateur et scénariste sont au diapason et donnent à cet album une réelle profondeur.

Le premier volet d’un diptyque prometteur qui aborde les séquelles laissées par la Grande Guerre de manière singulière et touchante.

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