© Dargaud 2015 - Larcenet |
Au retour des camps, Brodeck pensait pouvoir oublier l’incurie
de la guerre. Mais la nature de l’Homme est telle que, même dans ce coin
perdu au milieu de nul part, l’obscurantisme, la suspicion et la bêtise font leur œuvre.
Ayant
une vision plutôt récréative de la bande dessinée, Manuel Larcenet est
de ces (rares) auteurs que j’avais jusqu’à présent évité. Mais les
années comme les lectures aidant, il était temps de s’attaquer à l’un
des « poids-lourds » du 9e art hexagonal.
Graphiquement, ce diptyque est
une claque. Passant - sans transition - d’un naturalisme ultraréaliste à
un surréalisme métaphorique, l’auteur de Blast gère son noir et blanc
avec une évidence déconcertante. Maître dans la transcription des états
d’âmes, surtout les plus noires, certains passages sont de véritables
démonstrations à l’image de ce huis-clos avec le curé du village dont la
pertinence graphique et la justesse psychologique laissent pantois.
Manuel Larcenet possède (du moins sur ce récit) un indéniable don pour
faire ressortir la vilenie de ses personnages… Oppressant et poignant
par la densité de son dessin et la précision d’un trait sans concession,
« Le rapport de Brodeck » s’avère être bien plus qu’un simple album de
bande-dessinée.
Dans ce pays de neige où le noir donne son relief aux
objets et sa matérialité à la nature humaine, les innocents font de
parfaits coupables.
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