jeudi 7 novembre 2013

Paul et Louise. L'un femme, l'autre épouse !


© Delcourt 2013 - Cruchaudet
Paul ne veut plus retourner sur le front, quitte à déserter. Alors avec la complicité de son épouse, il se travestit et devient Suzanne. Nous sommes en pleine Der des Ders et la situation perdurera jusqu’à la loi d’amnistie de janvier 1925. 

Avec Mauvais genre Chloé Cruchaudet adapte La garçonne et l'assassin de Fabrice Virgili et Danièle Voldman et signe un album intense et profond. 

Restant relativement fidèle à la vie de Paul Trappe, l'auteure dépeint la lente transformation de cet homme qui a force d’être une autre en oubliera d’être lui même. Paradoxalement, à travers ce personnage hors du commun, le scénario évoque, notamment, l’émancipation de ces mères ou de ces épouses, qui après avoir fait tourner la France durant le conflit, retrouvent leurs mâles à la maison et doivent reprendre la place que l’Histoire à faite leur. Cependant, les choses ne seront plus jamais comme avant, et la parution de La garçonne en 1922 de Victor Margueritte en est l’une des premières prémices. C’est un peu cela que raconte Mauvais genre, et beaucoup d’autres choses encore… 

En effaçant les limites de ses cases, le trait sait faire éclater les carcans d’une mise en forme sur trois strips, rigide, à l’instar de l’époque. Il redonne ainsi à la composition des planches, souplesse, mouvement et dynamisme. À cela s’ajoute la parfaite gestion d’une monochromie toute en nuances que viennent seulement rehausser quelques parcimonieuses incrustations de rouge. 

Sur un sujet anecdotique, Chloé Cruchaudet réalise un très beau roman graphique (c’est plus classieux !) qui démontre une belle maîtrise de la page et un réel sens de la narration.

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