© Ki-oon 2019 - Tsuruta |
Emanon possède en elle la mémoire de toute vie sur Terre. Née de
l’imagination de Shinji Kajio et des pinceaux de Kenji Tsuruta, Emanon
promène, des pontons du Sun Flower aux forêts de l’île de Kyushu, sa
silhouette d’énigmatique adolescente…
Elle est l'inconnue à peine
entrevue dont le visage hantera toute une existence, mais elle est aussi
cette femme qui traverse les âges et conserve leur empreinte
mémorielle.
Sujet de fantasmes esthétiques ou objet d’angoisses
existentielles, Emanon - en perpétuant les souvenirs de ses
contemporains dans l’amnésie de ses génitrices - est éphémère et
immortelle ! Grâce à cette subtilité, Shinji Kajio livre un scénario qui
sait faire fi des effets spéciaux pour privilégier une narration des
plus intimistes. Longiligne, d’une nonchalante absence, Emanon erre avec
pour seule parure un vieux pull-over et pour unique apparat une
cigarette rivée aux lèvres. Avec délicatesse et sensualité, le trait de
Kenji Tsuruta s’attache aux contours des physionomies sans se priver de
luxuriants détails dès qu’il est question de paysages sylvestres. Ce
faisant, il rassemble aussi bien les amateurs de manga que les tenants
d’une bande dessinée plus occidentale. Mais au-delà du simple aspect
visuel des choses, son dessin puise son rythme dans sa capacité à
imposer une mise en scène qui distend la trame du temps au gré de
longues séquences muettes et d’ellipses parfois trop réductrices.
Empreint d’une délicate nostalgie, ce road movie nippon et aigre-doux
cultive un mélange subtile de regret et de fatalité.
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