vendredi 2 novembre 2018

LA PLUS BELLE FEMME DU MONDE

© La boîte à bulles 2018 - Roy & Dorange
La MGM fit d’elle la plus belle du monde ! La légende veut qu’elle inspirât Disney pour sa Blanche Neige et que la première Catwoman lui doive beaucoup. Morte à 85 ans dans une quasi-indifférence sans vraiment avoir marqué le 7ème Art, la technologie des communications ne serait cependant pas ce qu’elle est aujourd’hui sans elle ! Elle, c’est Hedy Lamarr. 

Née en Autriche en 1914, mais ukrainienne par son père et roumaine par sa mère, Hedwig Eva Maria Kiesler défraya la chronique cinématographique européenne avec Extase où elle mima le premier orgasme féminin du cinéma, elle n’avait pas encore 20 ans. Fuyant la montée du nazisme, elle émigra aux États-Unis où Louis B. Mayer essaya d’en faire l’égale de Garbo... sans réellement y parvenir ! Trop souvent réduite au rang de trophée, tous oublièrent qu’elle fut, avec le compositeur George Antheil, la co-inventrice de l’étalement de spectre par saut de fréquence qui est toujours utilisé pour le positionnement par satellites ou certains types de Wi-Fi ! 

Hedy Lamar (source en.wikiquote.org)
Sous ses airs de biographie, cet album s’avère très contemporain. Au travers de ce destin hors-norme, chacun pourra s’interroger sur la valeur de la beauté, le star system ou bien encore le formatage social qui empêche l'Humanité de valoriser pleinement la moitié de son potentiel. Femme indépendante et magnifique, autodidacte certainement plus intelligente que la plupart des hommes qu’elle côtoya, femme à hommes à la libido pathologique, mère discrète au point de cacher sa carrière à ses enfants, Hedy Lamarr s’avéra être une personne complexe et William Roy sait, dans un récit linéaire, rendre compte de son ambiguïté sans pour autant expliquer les contradictions de celle qui interpréta la Delilah de Cecil B. DeMille. Pour donner vie à cette innovatrice dilettante, Sylvain Dorange utilise une mise en page sur trois strips souvent en deux cases gardant ainsi une classique constance que viennent rompre quelques pleines pages. Simple et fin, le trait souligne les yeux, dessine les nez et laisse aux aplats de couleurs le soins d’animer des planches qui jouent avec les codes visuels de l’âge d’or d'Hollywood. 

Hedy Lamarr assuma sa double personnalité, mais elle eut visiblement le tort d’être née trente ans trop tôt. La plus belle femme du monde possède le mérite de la (re)mettre à l’honneur, comme ce fut aussi le cas, il y a peu, pour un certain Alan Mathison Turing.

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