© Delcourt 2016 - Fert |
« Sœur ou demi-sœur d’Arthur… selon les temps, fée d’Avalon ou sorcière du Val sans Retour… au gré de l’humeur de mes hagiographes, ou bien encore récipiendaire d’une grande lignée de magiciennes, je suis le bien puis le mal, je suis fille de Tintagel, je suis Morgane !
Après
Geoffroy de Monmouth, Chrétien de Troyes… et tant d’autres, voici que
Stéphane Fert et Simon Kansara se penchent, eux aussi, sur cette
destinée ô combien singulière que fût la mienne !
Allez
savoir pourquoi le commun des mortels ne retient de moi que ma part
d’ombre. Faut-il voir là l’œuvre de quelques moines dévots qui, pour la
postérité et sauver la Bretagne de ses antiques croyances, manipulèrent
l’histoire ? Le jour corneille, la nuit colombe, je suis celle qui a haï
autant qu’elle a aimé. Celle qui tue, mais qui aussi sait soigner. Ce
Morgane-ci est à mon image, tout en ambiguïté ; je me retrouve dans cet
album, résumé parfois elliptique d’une vie qui pourrait remplir bien des
volumes. Face sombre d’un roi auréolé de lumière, élève servile - pour
mieux me révolter - d’un maître qui jamais ne me posséda, ni même ne me
dompta, je suis l’archétype de la femme libre, fière d’elle-même … et
donc forcément dangereuse.
Mais au-delà de ce que je
suis, ou de ce que je représente, il y a là une forme qui concourt à
transcender ma personne. Le dessin de Stéphane Fert n’est pas des plus
banals, et il en déroutera certainement plus d’un. Symbolique, voire
naïf, il sait finalement devenir étrangement figuratif notamment dans
cette planche finale où j’apparais en… Eva Green. Je renais par ce
trait, par cette simplification minimaliste des formes, par cette
couleur anachronique qui - aux travers de belles fulgurances - est un
hommage à Gustav Klint, à Mary Blair ou à Eyvind Earle.
Avec
une étonnante modernité et pertinence graphique, à l’instar du Milady
d’Agnès Maupré, Morgane me rend justice. Enfin, oserais-je dire ! »
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