© Marabulles 2019 : Bégaudeau & Guillard |
Guylaine n’est pas ce qu’il est convenu d’appeler
une jolie femme. En fait, Guylaine est moche…, du moins, elle se voit
comme telle !
La beauté…, vous avez quatre heures !
Pour leur part, François Bégaudeau et Cécile Guillard s’essayent à
appréhender, au travers d'une existence, cette injonction sociétale en
quelques cent-quatre-vingt-douze planches.
Au gré des années qui passent, Guylaine traine sa « mochitude », utilise
tous les subterfuges pour s'en détacher tout en étant obsédée par cette
perfection corporelle qui se refuse à elle. Le choc, la révolte, la
tristesse, la quête de sens et, enfin, la sérénité… In fine,
Guylaine fera le deuil d’un état de grâce qui l’a ignoré, d’une vie qui
aurait pu être différente si elle avait été de celles sur qui les hommes
se retournent ! Avec subtilité, les dialogues suivent la progression
psychologique d’une héroïne qui ne l’est pas et donne à cette
autobiographie imaginaire toute sa densité et son à-propos, car la force
première de cet album est d’être terriblement humain. Guylaine devient
en fait la porte-parole de cette foule d’invisibles, victimes de la
tyrannie de l’esthétisme. Pour dépeindre un tel sujet, Cécile Guillard
opte pour une mise en couleur monochrome, terne, aux teintes éteintes
sans véritable relief, mais non dénuées de subtiles variations. Le trait
est à l’unisson, volontairement épuré, sans fioriture, axé sur
l’essentiel en évitant l’accessoire et se retrouve au service d’un récit
où le fond prime évidement sur la forme.
La vie d’une moche est de ces albums qui amènent à se poser, ne
serait-ce qu’un instant, une foultitude de questions et à regarder le
monde différemment… La vraie beauté est intérieure, dit-on, mais
uniquement pour ceux/celles qui se donnent la peine de la rechercher !
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