vendredi 27 juillet 2018

RATTRAPAGE ESTIVAL

Mattéo : quatrième époque
Ar-Men : L'enfer des enfers
Le joueur d’échecs
Les cent nuits de Héro


Les vacances d’été – à l’ombre, sur une terrasse, face à la mer - constituent une occasion propice pour récupérer un retard accumulé durant un semestre (ou plus !) ou pour apprécier pleinement certains albums. 
Sur la table-basse attendent le dernier Mattéo, Ar-Men, Le joueur d’échecs de Sala et Les cent nuits de Héro. Des albums qui demandent une relative concentration ! 

© Futuropolis 2017 -  Gibrat
Avec Quatrième époque, le soleil de la Catalogne illumine les planches d’un Jean-Pierre Gibrat au sommet de son art. Mais curieuse impression que celle de voir cette guerre traitée avec une telle débauche de couleurs et de joie de vivre. L’époque est sombre, mais le traitement graphique est joyeux et les dialogues traduisent une anachronique insouciance face à des évènements qui deviendront la répétition de la Seconde Guerre mondiale. In fine Gibrat traite la Guerre d’Espagne avec une désinvolture (ou avec un fatalisme désabusé) qui siérait mieux aux premiers congés payés de 36, Toutefois comment ne pas être séduit par un Mattéo qui prend (enfin) sa vie en main et ces femmes plus fortes que bien des hommes.

© Futuropolis 2017-  Lepage
Sur un registre tout autre, Ar-Men : l'enfer des enfers offre un passionnant récit de mer comme seul Emmanuel Lepage sait les dessiner. À travers le destin de ceux qui le construisirent et dont certains en furent les gardiens, il évoque avec profondeur, justesse et humilité un lieu mythique pour les bretons et de désolation pour les marins. Dieu que la Bretagne est belle et Ar-Men fascinant. Histoire de mer et de ses fortunes diverses, récit d’hommes (et de femmes) accroché(e)s à leur rocher, journal intime d'hommes blessés par la vie, cet album est de ceux qui vous font voir nombre de choses sous un angle différent et prendre conscience que certains grands destins se forgent dans le quotidien. 

© Casterman 2017 - Sala
Troisième album, celui de David Sala. Le joueur d’échecs, d’après Stefan Zweig, trouve ici une mise en dessin à sa hauteur. Avec sa mise en couleurs directe , sans aucun encrage, l’illustrateur strasbourgeois transpose magistralement cette œuvre en recourant à des métaphores graphiques des plus subtiles. La folie, l’angoisse, la peur, mais également la suffisance, l’indifférence et une large palette de sentiments humains transparaissent à travers un graphisme et des couleurs qui ne peuvent laisser indifférents. D’aucuns invoqueront les maîtres autrichiens du siècle dernier, plus modestement, il faut peut-être voir là un récit qui a profondément inspiré David Sala ! 

© Casterman 2017 - Greenberg
Enfin l’onirique Les cent nuits de Héro d’Isabel Greenberg dont la (fausse) naïveté et la complexité du graphisme viennent donner corps à une variation des milles et une nuits où il est question (entre autres) d’intolérance à la différence. Sur un encrage appuyé et un choix limité de couleurs pour en rehausser l’intensité, la jeune dessinatrice anglaise n’hésite à recourir à des dialogues d’un savoureux anachronisme mais qui font la transition entre ces histoires d’un temps imaginé et la réalité. N’hésitant pas à casser les codes du conte traditionnel pour servir son propos, les Cent nuits de Héro est un album militant mais qui sait dire les choses joliment ! 


Bien évidemment, la lecture de ces quatre albums - représentatifs de la variété des genres et des styles qui ont cependant en commun leur grande qualité - est chaudement recommandée.

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