vendredi 27 septembre 2013

The return of Eve...


Burlesque Girrrl : 2. Tome 2/2
 
Chère Violette,

© Ankama Éditions 2013 - Amoretti
L’accident de Peter vous a laissé seule, perdue. Puis, petit à petit, l’envie de dévorer la vie est revenue, vous ramenant à vous-même. Vous n’étiez plus The Queen of Pain, celle que chante Colleen Duffy.
Violette, tendre Violette. Tout en finesse et en délicatesse, François Amoretti vous a fait un album sur mesure, centré sur vos états d’âmes et vos charmes burlesques, quitte à sacrifier ceux qui gravitent autour de vous. Une véritable déclaration dessinée !
Sur ce deuxième volet, vous vous épanouissez, certes dans la douleur, mais celle-ci semble vous rendre plus forte, plus belle. Votre histoire sonne comme une thérapie : vous y exposez vos choix. Vous revendiquez votre amour pour les vieux hot rods survitaminés, les riffs old school et les effeuillages lascifs. Pleine, entière, vous vous affichez dans les créations de Perrine Felicia Fernandez et assumez l’héritage musical de votre ami défunt. Mais que personne ne se méprenne, et ceux qui vous confondraient avec un obscur objet de désir en seraient pour leurs frais !
Papier mat et lourd, couleurs chaudes au charme désuet, doubles pages à faire pâlir Hugh Marston Hefner, tout confine à l’éveil des sens sur ce dernier opus. Il en serait pour le mieux s’il ne manquait un "je ne sais quoi" au scénario de votre vie. Ce petit rien qui transformerait définitivement l’intérêt esthétique qui peut vous être porté, en empathie …
J’ai terminé ma lecture sur les ultimes mesures de The Return Of Eve. Tatouages, Rock and roll , grosses cylindrées et striptease… Finalement, tout cela est délicieusement fashion !
Bien à vous.

PS : Savez-vous si les Devil Doll envisagent de tourner sur le Vieux Continent un de ces jours ?

mardi 24 septembre 2013

Y'a quelqu'un ?


Le mangeur d'âmes : 1. La porte
 
© Vents d'Ouest 2013 - Lapierre & Boutin-Gagné
Lac-à-l’Ombre, petit village perdu dans l’hiver québécois est le lieu de bien curieux événements qui viennent en rompre la tranquillité. Entre légendes et merveilleux, le destin de ses habitants va basculer à jamais… 

Parue en 2011, La bête du lac n’avait pas été – lors de sa sortie outre-Atlantique - l‘objet d’une promotion forcenée en France. Deux ans plus tard, Vent d’Ouest tente à nouveau l’aventure en sortant le tome 2, mais change de titre et opte pour Le mangeur d’âmes

Transposant sur les grandes étendues de la Belle Province certaines paraboles du Vieux Continent en les métissant joliment avec ceux de la culture amérindienne, La porte comme Le gardien ravira petits et grands.

La structure très classique des planches peut surprendre pour un album dont les confrontations belliqueuses prennent progressivement une tonalité heroic-fantasy ! La force de François Lapierre est justement de savoir contenir dans un espace très structuré et des enchainements précis un récit à plusieurs lectures, le tout reste ainsi parfaitement cohérent et canalisé. À cela s’ajoutent quelques dialogues savoureux qui, loin de paraître anachroniques, confèrent à l’ensemble une pointe d’humour et relativisent la noirceur du propos. En écho, le trait fin et synthétique de Patrick Boutin-Gagné apporte sa précision et son détachement à une kyrielle d’êtres improbables qui, juste avant d’éteindre les lumières, feront gentiment frissonner les plus jeunes tout en offrant à leurs aînés une histoire plaisante à lire.

vendredi 20 septembre 2013

The B.A.D isn't so good !


Frontiers : 1. La traque
 
© Glénat 2013 - Pivert
Le B.A.D préserve les secrets technologiques importés par les extra-terrestres en goguette sur Terre et, à l’occasion, s’occupe d’affaires un peu plus sordides comme celle d’un serial killer alien qui adore les jolies jeunes filles. 

Que dire de ce premier opus des Chroniques des agents du B.A.D ? Si le dessin hyper réaliste sait agréablement détailler la plastique de quelques pin-up de chair, de poils ou de plexiglas, le scénario s’avère pour le moins décousu. Sur un pitch qui ne peut s’émanciper de celui de Men in Black, Christopher Wild se livre à un exercice périlleux en mélangeant enquêtes policières multiples, humour décalé et sosies de Bogart ou d’Einstein, sans oublier vampires et loups-garous, tout cela sur un fond monochrome faussement steampunk. 

Un album qui emprunte trop de références pour se trouver une réelle cohérence…

Marina ah ah ah oh oh oh... (air connu)


  
© Dargaud 2013 - Drousie & Matteo
La République a ses raisons que le cœur ignore ! Telle semble être la maxime d’Andrea Dandolo, premier édile de la Sérénissime en cette année 1342. En effet, pourquoi tant de hâte et d’acharnement à vouloir la perte de son enfant, Marina ? Cette question pourrait trouver réponse sept cents ans plus tard, alors que l’épave de la Pantegana (le rat en vénitien) est exhumée de son cimetière de vase. 

Depuis quelques années, avec des titres comme Les Folies Bergère, L’élève Ducobu, Le client, Schumi, La peau de l'ours, Maître Corbaque ou Pendant que le roi de Prusse faisait la guerre qui lui reprisait ses chaussettes ?…, Benoit Drousie fait preuve d’un talent pour le moins éclectique. Une telle réussite dans des registres aussi variés a de quoi susciter des interrogations et n’y aurait-il pas un domaine où le scénariste belge puisse s’illustrer avec moins de brio ? A priori, la fresque historique en est exclue, car une fois encore – dusse sa modestie en souffrir – Zidrou frappe fort et juste. 

Prenant pour pitch l’obsession d’un historien pour la fille maudite d’un doge du XIVe, le récit passe d’une rive à l’autre de l’Adriatique aussi aisément qu’il navigue à travers les siècles. Les enfants du Doge est une histoire noire comme les âmes, dure tel le Moyen Âge, mêlant sans ménagement les fioritures des processions de Saint-Marc à la misère de Doulopolis ou aux scabreuses circonvolutions des guerres vénéto-ottomanes. Campant fermement la psychologie de ses personnages grâce à des dialogues taillés au cordeau, l’exilé madrilène installe son récit dans la densité et l’intensité. Toutefois, rendons justice à Alemanno Matteo - compagnon de longue date depuis Mèche Rebelle et proTECTO - sans qui cette épopée maritime ne serait pas ce qu’elle est. Par un trait réaliste et dépouillé, mais surtout grâce à sa mise en couleur, l’album prend une indéniable dimension picturale en totale osmose avec les tonalités du scénario. 

 En ce début septembre, Marina fait une apparition remarquée dans le flot des parutions de cette rentrée… Uno molto bello fumetto !

jeudi 12 septembre 2013

Gauthier ! Reprendriez-vous un peu de désert ?


Croisade : 7. Le maître des sables

© Le Lombard 2013 - Dufaux & Xavier
Guy de Lusignan a rompu la trêve établie avec les troupes du sultan Ab’Dul Razim et Gauthier de Flandres doit lui exprimer les regrets de la Chrétienté pour cette fâcheuse affaire. Cependant, une toute autre motivation le pousse vers la ville sainte. La Main de Dieu contre le souffle du Diable, le combat n’est pas qu’entre Croisés et Infidèles, mais aussi dans le cœur de chacun d’eux, et le Simoun Dja y veille !

Troisième volet du cycle Nomade, Le maître des sables s’enfonce un peu plus dans l’immensité du désert et de la folie. Au gré des parutions, Jean Dufaux dote ses personnages principaux d’une psychologie tourmentée. Entre la fille de Grégoire d’Arcos ne sachant qui de l’Orient ou de l’Occident choisir, la trop belle Sybille d’Aubois ne trouvant de volupté que dans la laideur ou Gauthier de Flandres dont la témérité n’est que mortifère, les héros de Croisade sont pour le moins torturés. Seuls les bad guys restent dans un machiavélique manichéisme qui semble - pour l’instant - leur épargner les affres de l’introspection.

À l’image d’un casting qui s’abstient de toute facilité, le chemin de croix du jeune chevalier est toujours parsemé de digressions qui en font tout l’attrait sauf si - au détour d’une dune - elles venaient à rompre le cours du scénario. Sur ce récit aussi riche qu’un plateau de desserts orientaux, Philippe Xavier développe toujours un dessin à l'esthétique très travaillée et joliment rehaussé par la mise en couleur de Jean-Jacques Chagnaud.

Variation des Contes des mille et une nuits, Croisade est en passe de devenir une référence en la matière. En espérant que le charme perdure au fil des albums et qu’il ne succombe point à la magie destructrice du Qua’Dj’...

mardi 10 septembre 2013

Humour à froid pour sujet chaud


Ecolomancho : 1. Eternelle banquise

© Pat à pan 2013 - Parno & Jicé
En cette période estivale, le réchauffement planétaire est redevenu un sujet de saison. Il est vrai que de tout temps, la météo a toujours su s’imposer dans les discussions !

Il y a plus d’un an, le superbe Saison brune de Philippe Squarzoni marquait les esprits. Richement illustré et documenté, ce one shot interpellait sur le désastre climatique vers lequel l’Humanité court à grandes enjambées. Mais, à bien réfléchir, pour influer sur le cours des choses, la cible à privilégier est-elle encore celle des quadragénaires à la fibre écologique ? Ne faudrait-il mieux pas s’intéresser aux jeunes générations, puisqu’in fine ce sont elles qui devront assumer l’héritage généreusement légué par leurs aïeuls ?

À la première prise en main, c’est ce parti que semble adopter Ecolomancho. Impression trompeuse ! Si le graphisme de Jicé s’avère à la portée de quelques charmants bambins, l’humour - à froid - des strips de Parno s’adresse résolument à leurs parents. Compilation de courts sketchs noirs et glacés ayant pour fil conducteur les états d’âme des habitants - atypiques - du Pôle, l’ensemble peine toutefois à trouver un semblant de cohérence et un véritable rythme.

Un album dont les brèves histoires pourraient agréablement rafraichir les dernières pages de la presse régionale en cette période estivale et qui prêtera à sourire, avec un rien de mauvaise conscience, sur notre société en général et sur la banquise en particulier.